Le 09 Janvier 2017, nous annoncions la tenue à Koza le 12 Janvier suivant, de l’élection du Chef de 3è degré. Parallèlement, nous publions deux Interviewes. La première était celle de S.M PARDAPA ZANADI, vainqueur de ladite élection emportée il y a deux ans et plus précisément le 25 Août 2015, et la seconde celle de M. OUMATE MADI, perdant du 25 Août et aussi bien disqualifié que S.M PARDAPA ZANADI de la dernière consultation.Aujourd’hui c’est le tour de M. Mohamet LADE, un autre disqualifié de la série, de nous livrer son point de vue.
ENTRETIEN
Fini avec l’imbroglio autour de la Chefferie de Koza. Sa Majesté KIDALDI TAGUIEKE BOUKAR, Gouverneur de la Région de l’Adamaoua en poste, désormais Chef de 3è degré de Koza…Satisfait ou déçu ?
Satisfait de savoir que la population a compris et respecté nos appels au calme. Satisfait que de hauts fonctionnaires comme le vainqueur que vous encensez et tous ceux qui l’y ont accompagné dans le processus, aient donné au monde la preuve inouïe de ce que, le malheur du Cameroun n’est pas forcément l’œuvre d’un ennemi qui vient d’ailleurs, mais le Camerounais lui-même. Satisfait aussi que la forfaiture du 12 janvier dernier se soit déroulée en violation flagrante des textes.
Comment expliquez-vous votre attitude apparemment ironique ?
Je vous demande plutôt s’il fallait laisser ces populations de nature pacifiques, stoïques et calmes de la ville de Koza se soulever contre l’autorité administrative assez provocatrice et je dirai même moqueuse à son endroit? Si nous avions été naïfs, l’armée aurait chargé sous prétexte que c’est Boko Haram qui aurait tenté de ………. C’est fragile la paix dans cette localité. Il faut au maximum éviter toute étincelle dévastatrice. Et devant la justice et l’histoire nous aurions eu tort de n’avoir pas conseillé et encadré cette opinion (populations) qui « ne pense pas » comme nous disait Gaston Bachelard.
Vous parlez de « nous », à qui précisément faites-vous allusion ?
Il s’agit de Sa Majesté PARDAPA ZANADI, OUMATE MADI et moi. C’est grâce à nous que KOZA est calme après la singerie et la farce du 12 Janvier dernier. J’insiste encore trop sur ce « nous », parce qu’il a toute une symbolique dans cette histoire qui s’écrit.
Pourquoi une « symbolique » ?
Nous sommes des Candidats déjà exposés à la disqualification lors de l’élection du 25 Août 2015. Et comme vous l’avez constaté, la parodie du 12 janvier a confirmé l’imposture. Notre exclusion préméditée il y a 2 ans, s’est accomplie le 12 Janvier. La victoire de l’arbitraire.
Comment expliquez-vous cette observation ?
(Sourire) Nous sommes sept partants pour l’élection du 25 Août 2015. La GENDARMERIE NATIONALE dans le cadre de l’enquête de moralité reçoit les dossiers du Gouverneur de l’Adamaoua, HAMADOU SERVICE, MAMOUDOU GUIBAÏ, BOUKAR MASSAMA. LA POLICE quant à elle reçoit les dossiers de Sa Majesté PARDAPA, OUMATE Madi et moi. A l’issue de nos auditions, la GENDARMERIE déclare ses enquêtés éligibles et la POLICE dit émettre des RÉSERVES quant à notre éligibilité. En dehors des raisons selon lesquelles notre filiation chefale ou royale est douteuse, j’apprenais à la grande surprise que je n’étais pas éligible du fait d’être un handicapé moteur. Effrayé par la réaction populaire au cas où nous, les rejetés de la POLICE étions écartés, les organisateurs de cette parodie s’étaient retirés une quinzaine de minutes avant de revenir déclarer haut et fort qu’aucun des sept ne sera exclu de la course. A l’issue de cette opération de vote, l’élu est sorti de notre rang. Comprenez donc ce que redoutait le camp d’en face qui d’ailleurs pesait de tout son poids politique et administratif.
En quoi cette autorité administrative s’est-elle trouvée moqueuse à l’endroit de vos populations, du moment où il n’y a pas eu de candidats recalés le 25 Août 2015 ?
Les perdants auditionnés par la gendarmerie avaient remis en question la nature du scrutin. Entre autres raisons, dans leur requête ils évoquaient quatre motifs dont je me souviens de trois :
- Réception tardive des dossiers de certains candidats ;
- Mon statut de handicapé moteur ;
- Notre Filiation royale douteuse…
Pourquoi suis-je obligé d’y voir un élan moqueur à l’endroit de notre population ?
- L’Article 11 du décret n° 77/245 du 15 Juillet 1977, portant organisation des Chefferies traditionnelles prévoit que « les notabilités coutumières compétentes sont obligatoirement consultées pour la désignation d’un chef.» Si celles-ci au nombre de 21 n’ont pas remis en question les sept Candidatures en 2015, il devient incompréhensible qu’en 2017, quelques unes soient écartées du processus du 12 Janvier dernier. Ce qui force à déduire que ceux qui ont voté ce jour-là n’ont aucune légitimité. Le peuple ne les a pas mandatés.
- Les Notables qui votent le 25 Août 2015 portent les voix des populations qu’ils représentent. Et l’annulation de cette élection devrait être suivie d’une NOTIFICATION à chacune des parties prenantes qui devrait être informée des motifs de cette annulation…Tout au contraire, l’élection du 12 janvier s’est déroulée en catimini. Nous en avons été informés par la radio-trottoir et des communiqués laconiques affichés à certains carrefours de la ville.
- Le nouvel élu de par sa non résidence effective à Koza, viole les dispositions de l’Art. 17 du même décret.
Revenant au troisième point que vous venez d’exposer, que dites-vous du Lamido de Garoua qui siège au Gouvernement à Yaoundé ? Cesse-t-il d’être Chef traditionnel du fait de sa non résidence permanente à Garoua ?
Une question intéressante. Mais vous vous heurtez à la notion de chronologie des faits. Le Lamido de Garoua au moment de son accession au trône n’est pas membre du Gouvernement. Il le devient plus tard sur haute et discrète raisons du Chef de l’État. Faites un rapprochement avec les textes, vous constaterez que dans l’esprit des textes, cette résidence sur le territoire de commandement serait plus effective avant et pas forcément après l’accession au trône….Même si au regard de l’actualité, quelques exceptions à la règle sont visibles autour de nous.
Lorsqu’on vous écoute, des points obscurs apparaissent et fragilisent votre position. Revenant au même décret du 15 Juillet 1977, l’Article 8 prévoit entre autre que « les candidats doivent remplir les conditions d’aptitude physique et mentale requises (….) ». Or, vous affirmez être physiquement handicapé. N’est-ce pas contradictoire ?
La loi parle « d’aptitude physique et mentale requises ». Pouvez-vous me citer un seul élément faisant partie de cette aptitude « requise » et qui me met hors course ? Ayons la politesse morale et intellectuelle de respecter le rapport des spécialistes. Du moment où un Médecin m’a déclaré apte, il n’appartient à personne d’autre d’en remettre en question. Je pense au plus au profond de mon âme que cette position relevait ni plus ni moins, d’une forme de discrimination… De même, que représentent les responsabilités d’un Chef de 3è degré à Koza, comparées à celles de Me DOUALA MOUTOME qui fut une fois Ministre de la Justice, du Général de Brigade d’Infanterie TAKA SONGOLA malade et qui une fois, passait en revue les troupes à bord d’un véhicule ? Quel exemple tirons-nous du Tchad voisin où, le Ministre de la Communication, handicapé moteur assure avec brio ses fonctions ? Quelle lecture faisons-nous de l’exercice du pouvoir actuel en Algérie ?
La consultation du 12 Janvier dernier a marqué l’élection du Chef de 3è degré de Koza. Vous vous plaignez en brandissant vos arguments. Quelle est la position du Chef de Canton qui de toute évidence aurait validé cette élection ?
Je ne connais pas ce qu’il pense. Vous pouvez vous-même lui posez cette question. Cependant, je crois qu’il en serait déçu au moins de deux raisons :
- L’élection du 12 Janvier s’est déroulée à la Sous-Préfecture et non à l’esplanade de la Chefferie de Canton, comme l’idéal l’aurait exigé.
- J’ai appris selon des sources bien introduites, qu’il a été chassé de la salle le 12 Janvier dernier. Voyez-vous qu’un Chef de Canton (2è degré) soit interdit d’assister à l’élection d’un de ses plus proches Collaborateurs (3è degré). C’est difficile de comprendre !
De qui était donc constitué le Collège Électoral, puisque à vous écouter, les 21 électeurs légaux ont été exclus ?
En attendant me rendre à Mokolo pour vérifier les informations que j’ai sous la main, il m’a été rapporté que les Électeurs seraient des Sages recrutés pour la circonstance. Mais qui sont-ils ? Leur identité ne nous a pas été révélée.
Qu’attendez-vous faire maintenant ?
La république nous donne toute une batterie de voies de recours. Nous allons les exploiter dans les meilleurs délais.
Vous pensez-vous capables de renverser la tendance, dès lors que le drapeau de la république est déjà hissé devant le domicile de Sa Majesté KILDADI T. BOUKAR à Koza ?
C’est vous qui m’apprenez que le drapeau flotte devant sa porte. C’est assez tôt ça. Dans tous les cas, cela n’est qu’une vue des faits. Nous faisons confiance à notre justice. Elle tranchera.
Propos recueillis à Maroua le 15 Janvier 2017
Par KAIZER XAMELY