
Le 06 Juillet dernier, Abraham MA’ HAMA notre Collaborateur est condamné par le TPI de Mora à la peine et trois ans de prison, assortie d’une amende de cent mille et de dommages et intérêts de cinq cent mille francs. Cette sentence prononcée avec beaucoup d’émotions et de fébriles gesticulations, fait suite à une affaire dont les grands axes (Rappel des Faits) ci-dessous reproduits, rappellent bien à notre conscience, que le droit du plus fort serait au cœur du dispositif judiciaire de Mora. Cette justice du plus fort resterait le plus inflexible et opiniâtre de tous les droits, comme semble nous rappeler du lointain « Le Loup et l’Agneau », la sadique et impitoyable Fable de Jean de La Fontaine. Ne devrait-on pas rappeler que J.J Rousseau a longtemps remis en question ce schémas qui confère au plus fort tous les privilèges? Il s’en était même moqué lorsqu’il disait : » Rien n’est plus fragile que la force, plus instable que le rapport de force. Le tyran qui dort est à la merci du Chef de sa garde (….) En réalité l’affirmation d’un droit le plus fort révèle la faiblesse de celui qui le revendique (…). » Abraham MA’ HAMA, notre collaborateur pourrait vraisemblablement partager ce jour cette réflexion de Rousseau. Lui qui a écopé de trois ans de prison suite à une procédure inique, est désormais libre. Liberté obtenue après avoir croisé le sort pathétique de nombreux autres citoyens qui dans cette ville par crainte de représailles de ce plus fort et/ou plus offrant, préfèrent le silence à toutes revendications de leurs droits violés. Doit-on donc taire ces infimes illustrations choisies parmi tant d’autres ?
- Le 06 Octobre 2019, Mlle Asta[1] est soustraite manu militari des antres de son Église par un Officier de Police Judiciaire de la gendarmerie. Et pour causes ? Il était reproché à la jeune lycéenne le fait que, de naissance musulmane, elle s’est convertie au christianisme. Elle séjournera en cellule quelques heures avant d’être libérée sur instruction du Chef d’Unité. Le Pasteur ce jour-là échappe de justesse à l’humiliation.
- Abdoulaye[2] après avoir passé plusieurs jours d’hospitalisation suite aux tortures à lui infligées par les pandores de la BTG de Mora, est condamné à 5 ans sans que sa santé fragilisée par des séances[3] de tortures n’ait suscité l’attention des Maîtres de Céans.
- Un Commandant[4] de Brigade de Gendarmerie, surpris en flagrant délit de vol, jamais puni
- Un Chef de village qui défie l’autorité de l’État s’est marié le 27 Mars dernier à une mineure. Malgré le rappel à l’ordre du Premier Ministre Chef du gouvernement, il est resté imperturbable et les faux documents produits à cet effet classés.
- Que dire de cet effilé lycéen[5] de 15 ans, fils de cultivateur, torturé et gardé à vue plus de cinq jours durant dans les cellules de la BTG de Mora, accusé d’avoir violé une robuste mineure de 14 ans, fille de gendarme ?
Ce qui précède est d’une gravité telle que, le sort infligé par cette institution répressive à Abraham MA’ HAMA notre collaborateur, n’est qu’un élément de plus qui appuie nos multiples dénonciations d’hier et d’aujourd’hui. Bien plus, l’ ENTRETIEN (ci-dessous publié in extenso) que le concerné nous accorde suite à son acquittement par la Cour d’Appel le 09 Novembre dernier et en faveur de la commémoration du 73è Anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (10 décembre 1948 – 10 décembre 2021), a davantage le mérite d’afficher les tares et contradictions de cet appareil judiciaire, mais aussi et surtout de rétablir sa réputation ternie par cette fausse histoire d’escroquerie.
RAPPEL DES FAITS[1]
N° | DATE | EVÈNEMENTS |
25 Juillet 2020 | M. Abatsoua Mahama ( connu sous le nom de Alhadji Tougjé) me contacte et passe une commande de quatre poteaux en bétons décorés. La main d’œuvre est conclue à quatre-vingt-dix mille francs. Cependant, il est convenu qu’il devra non seulement verser une avance de trente mille francs, mais en plus, devra-t-il mettre à ma disposition la matière première qui se résume en huit sacs de ciment. En marge de ce contrat verbal de prestation de service, je lui fais comprendre suite à sa demande d’installer lesdits poteaux dans son chantier, que je ne suis qu’un fabricant et seul un maçon à sa charge pourrait le faire. | |
10 Oct. 2020 | Alhadji Tougjé se présente dans mon atelier et exige purement et simplement la restitution de tout ce qu’il m’a remis presque trois mois plus tôt, c’est-à-dire le 25 Juillet dernier. Il s’agissait bel et bien de la somme de trente mille et des huit sacs de ciment. Ma réaction est claire et compréhensible. Je lui demande comment explique t-il cette démarche ? Pourquoi avoir attendu tant de mois, sans se plaindre et choisir cet instant où le travail est achevé pour réclamer remboursement ? Je lui dis (et les lui présente) que ces quatre poteaux sont prêts et que la seule option pour lui était soit de les récupérer et régler le reliquat de soixante mille comme convenu en Juillet dernier, soit d’attendre que je revende ses poteaux et lui restitue ce qu’il exige. | |
26 Oct. 2020 | je reçois du Président du Tribunal (PT) une Convocation à me présenter dans son Cabinet 48h plus tard. | |
28 Oct. 2020 | La position du PT s’inscrit dans le même registre que celui d’Alhaji Tougjé. Il exige que tout ce que j’ai reçu et perçu de ce dernier, lui soit restitué dans les 24h qui suivent. Entre-temps ma Carte Nationale d’Identité y est retenue en signe de gage. | |
22-24 Déc. 2020 | je suis placé en garde à vue au sein de la Brigade Territoriale de Gendarmerie de Mora ; | |
29 déc. 2020 | je suis entendu sur Procès Verbal dans le Cabinet du Procureur Toutefois, il m’avait été dit qu’une fois le PV saisi, le parquet ferait appel à moi pour lecture et signature. Mais jusqu’à ce jour je continue d’attendre l’occasion de vérifier le contenu de ce PV et de le signer. | |
29 Mars 2021 | Je reçois d’un huissier, une Citation à Prévenu – à comparaître en audience par devant le TPI de Mora |
ENTRETIEN
Comment expliquez-vous qu’à l’occasion de votre garde-à-vue des 22, 23 et 24 décembre 2020, vous n’ayez pas pu faire valoir vos arguments contre sieur Alhadji Tougjé ?
Demandez plutôt aux gendarmes qui m’ont emmené manu militari, sans convocation préalable, les raisons pour lesquelles ils n’ont pas accepté de toucher du doigt la présence effective des poteaux de mon bourreau dans mon atelier. Fallait-il vraiment me coffrer alors que le travail avait été fait ? Etais-je vraiment obligé de restituer l’avance perçue alors que la travail avait déjà était fait ?
Vous avez néanmoins promis restituer cette avance ?
Je l’ai fait sous conditions et surtout par souci de paix
Lesquelles conditions?
J’ai dit aux gendarmes et réitéré devant le Procureur que je pouvais pour des raisons de paix lui restituer cette avance à condition de revendre les poteaux déjà fabriqués. A défaut je ne pouvais faire autrement.
Aviez-vous vraiment besoin de cette paix vis-à-vis de celui que semblait piétiner vos intérêts ?
Faire des concessions avec un fautif, par souci de paix, n’est pas signe de faiblesse. C’est une grande marque de l’âme qui s’épanouit. On en sort toujours grandi. Les Accords de Camp David entre Saddate et le leader Israélien le prouvent à souhait, malgré le sort qui fut réservé au leader Égyptien.
Dans votre Mémoire en Défense du 1er Avril 2021, Page 6, vous avez écrit : « J’ai été entendu dans le Cabinet du Procureur le 29 Décembre 2020. J’apprenais à cette occasion qu’après saisie du manuscrit, je passerai signer ce PV. Depuis cette date, voici trois mois, je n’en ai plus entendu parler. Je présume que ce PV que je n’ai pas pu relire encore moins signer, est désormais introduit dans le dossier transféré au siège. Comment peut-on interpréter cette démarche qui viole l’Art 90 (3) du CPP et semble davantage réduire mes arguments à zéro ? » Comment cet aspect de la question a-t-elle évolué avant votre condamnation ?
Mon PV n’a jamais été relu encore moins signé jusqu’à ma condamnation six mois après mon audition au Parquet.
Pourtant une source laisse entendre que vous aurez refusé de le signer ?
Convoqué au Parquet après avoir rendu public mon Mémoire dont copie était adressée au Procureur Général, le Vice-Procureur m’oblige de signer ce PV. J’insiste que je le signerais à condition qu’un des miens, hors du Parquet l’ait relu et me rassuré que le contenu était de moi. Condition qu’il n’a pas acceptée avant de me rappeler sous fond de railleries, je le cite : « Tu penses que les Droits de l’Homme peuvent faire quoi ? »
Qui est le Vice-Procureur ?
C’est un tip qui travaille au Parquet. Il n’est pas magistrat, ne le sera jamais du moins dans la présente incarnation. Il a la particularité d’être trop arrogant et influent auprès des usagers de Justice. Il donne l’impression d’être au-dessus des Substituts du Procureur. Bien d’indices le prouvent. Certains usagers l’appellent Maître. Ce portrait robot contredit le Procureur de la République et tous ses Substituts connus pour leur nature affable, avenante, sympathique, etc., le tout décorée par une humilité et simplicité légendaires.
Après le refus de signer, vous aurez brillé par le refus de vous présenter aux audiences, si l’on s’en tient à la position du Tribunal ?
C’est du mensonge. Le Tribunal ne peut pas prouver ces Convocations. Toutes les audiences se déroulaient à mon insu. Lorsque je l’ai su, j’ai informé le Procureur Général de cette réalité. Dès cet instant je m’invitais chaque semaine au Tribunal dans l’espoir de passer à la barre. C’est ainsi où le jour de ma condamnation, je me suis présenté croyant le moment venu pour le débat. Que Nenni ! La sentence est tombée sans que je n’aie eu à dire un seul mot. Comment peut-on donc me déclarer absent aux audiences auxquelles je suis convié sans preuves et me condamner devant le même Tribunal sans m’avoir donné le temps de m’exprimer ?
Y avait-il donc selon vous, un projet de nuisance contre vos intérêts ?
Je ne voudrais pas en dire plus. Ce serait puiser dans la poubelle de la vie. Je suis là pour vous dire ce qui s’est passé. Justifier ne m’intéresse pas.
Avez-vous néanmoins l’intention de porter plainte contre votre « tombeur » ?
L’histoire est muette lorsqu’il s’agit de nommer le Soldat Juif qui avait de sa lance perforé la rate de Jésus-Christ, elle l’est encore à nommer les soldats qui avaient fusillé Martin-Paul Samba, Um Nyobé, Ossendé Afana, Ernest Ouandjié, Pasteur Martin-Luther King, etc. Elle ne dit rien du juge qui avait prononcé le verdict contre Nelson Mandela, Mgr Albert Ndogmo, etc. C’est vous dire que la vie des injustes victimes est plus préoccupante aux historiens que le sort de leurs bourreaux. Pourquoi voudriez-vous donc que je m’occupe de mes bourreaux alors que le meilleur est à venir ?
Certaines langues disent que votre séjour carcéral a été « gratuit » puisque votre cas n’a fait l’objet d’aucune alerte à l’échelle Nationale et même internationale. Qu’en dites-vous ?
Avant toute annonce ou déclaration publique, il y a une diplomatie de couloir qui définit les bases de toutes dénonciations. Pour le cas de figure, nous avons refusé à certaines organisations sœurs du pays et de l’étranger, d’évoquer mon cas et cela pour trois raisons : La première force à retenir que Ce qui m’est arrivé n’est pas la résultante d’un bras de fer entre le gouvernement et nous ou moi. La deuxième repose sur le fait que la Grande Chancellerie informée de tous les détails de cette sordide histoire, suivait de très près mon affaire. La troisième tient au fait que notre Organisation n’aime les feux de la rampe. La discrétion fait partie de nos principes Cardinaux qui se résument en trois points : OSER dénoncer sans mentir, AGIR sans vengeance, SE TAIRE ou s’effacer par souci d’humilité.. Alors à quoi auraient donc servi des tapages médiatiques autour de mon affaire ? Ne suis-je pas acquitté ?
Trois ans de Prison ferme, quatre mois d’incarcération au sein de deux pénitenciers (Centrale de Maroua et Principale de Mora), puis acquittement. Que peut-on retenir des conditions d’incarcération dans les deux prisons ?
Rien de bon. Les détenus à Mora ont quand même assez d’eau, des toilettes interne et externe. Manque de médicaments, ration alimentaire indigne de notre dimension humaine. Côté Rapports humains, de mauvais souvenirs : Un gardien de prison surnommé Membre a souvent refusé que le repas me soit transmis, non sans avoir plusieurs fois intimidé les miens. Une autre fois, c’est le Régisseur qui m’a convoqué à son bureau et m’a servi quelques séquences d’intimidations injustifiées. De bons souvenirs : Je les dois à l’Infirmier de cette Prison très disponible, père de prisonniers, mais dont le rendement est nul, faute de matériel (médicaments et autres). Je n’oublierai pas les sœurs Catholiques qui marquent tous les esprits dans cette prison, grâce à leurs soutiens multiformes qui permettent à de nombreux prisonniers de vivre dans l’espérance.
Du côté de Maroua, rien de bon. Tout y est affreux. Manque criard d’eau. De nombreux fous et aveugles y purgent des peines, J’y ai trouvé des prisonniers abandonnés par les leurs et affamés qui ramassent des pelures de bananes dans les urinoirs et les mangent.
Message de fin
Je remercie toutes les bonnes volontés qui se sont mobilisées pour ma cause. Épargne-temps de les nommer. Elles se reconnaîtront.
Propose recueillis le 10 Décembre 2021
https://psydh.com
[1] https://psydh.com/2020/02/05/cameroun-societe-fete-de-la-jeunesse-2020-au-mayo-sava-ou-rien-ne-va-quelle-jeunesse-demblee-sacrifiee-et-sans-protection/
[2] (a) https://psydh.com/2017/07/21/cameroun-mora-les-preuves-qui-accablent-le-commandant-de-la-brigade-t-de-gendarmerie-presume-tortionnaire-dune-autre-ere/
[4] https://psydh.com/2019/04/18/cameroun-extreme-nord-mayo-sava-gendarmerie-nationale-un-commandant-de-brigade-pris-en-flagrant-delit-de-vol/
- [5] https://psydh.com/2021/11/12/cameroun-extreme-nord-mora-garde-a-vue-arbitraire-assortie-de-violences-physiques-sur-un-adolescent-de-15-ans-presume-avoir-viole-une-autre-adolescente-de-14-ans-1ere-partie/
- https://psydh.com/2021/11/12/cameroun-extreme-nord-mora-garde-a-vue-arbitraire-assortie-de-violences-physiques-sur-un-adolescent-de-15-ans-presume-avoir-viole-une-autre-adolescente-de-14-ans-2ieme-partie/