IMG-20190215-WA0003               Par  Alliance Fidèle ABELEGUE ,   Stagiaire – Maroua

Agitation dans les rangs des transporteurs motos, encore appelés moto-taximen (Bensékineurs). Un vent insurrectionnel souffle sur la ville de Yaoundé le 13 février dernier.  Des moto-taximen protestent de l’assassinat d’un des leurs par les « AWARA », pseudonyme aux agents de la police municipale de Yaoundé 1er. Suite à ces affrontements, Jean-Claude TSILA, le Préfet du Mfoundi  a signé le même jour un arrêté suspendant les  activités de ce corps de métier  pour une durée de 30 jours.

Au-delà de  la solidarité socioprofessionnelle

Tout est parti d’une interpellation d’un bensekineur par les agents de la mairie de Yaoundé 1er au lieu-dit « Carrefour Shell Elig-Edzoa ». Comme à l’accoutumée, les Awara dans ce type d’opérations saisissent régulièrement des motos des bensekineurs n’ayant pas toutes les pièces avec un accent mis sur l’impôt libératoire.  Cette fois-ci, la goutte d’eau a été de trop. Suite à une rixe entre  les Awara et un benskineur, ce dernier rend l’âme.  C’est donc dans un élan revanchard que les motortaximen ont  incendié  une voiture de la fourrière municipale, non sans boucher toutes les issues conduisant à la Mairie de Yaoundé 1er.

Mode de recrutement et de Gestion des « awara » remis en question

Des affrontements entre les agents municipaux et les acteurs du secteur informel sont récurrents. Fréquemment, les awara frappent, saccagent et vandalisent  les marchandises parquées aux bords de la route. Une bayem-sallam s’indigne  d’ailleurs de ce que  « les agents municipaux interceptent les marchandises pour les détruire, ils ne te demandent même pas tes papiers, puisqu’il y a des gens qui paient leur OAV[1] » et un bensikineur  de rappeler  qu’ « Il suffit que l’impôt libératoire soit payé dans une autre commune autre que la leur, pour qu’ils s’acharnent contre vous (…) »

La problématique de l’insertion socioprofessionnelle soulevée

Loin d’être un fait anodin, cet incident  interpelle les acteurs sociaux à questionner davantage les politiques d’insertion socioprofessionnelle au Cameroun. Le Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (MINEFOP) dispose d’un Programme Intégré d’Appui aux Acteurs du Secteur Informel (PIAASI). Cependant, on n’a jamais vu cet organe aux côtés des victimes des awara pour les dédommager ou les accompagner à formaliser leurs entreprises. Et pourtant, il est connu de tous que l’économie urbaine au Cameroun repose beaucoup sur le secteur informel animé de bout en bout par  les bensekineurs, vendeurs ambulants, bayem-sallam, etc.

Des exemples de stratégie d’insertion socioprofessionnelle des acteurs de l’informel.

Plusieurs structures non-étatiques ont compris l’enjeu de la question de l’insertion socioprofessionnelle. D’une part, il s’agit de permettre aux acteurs d’accroitre leurs revenus et de s’autonomiser. D’autre part, il est question de renforcer la cohésion sociale, en créant un climat d’entente, mieux un pont de compréhension, entre les acteurs de différents métiers, et les leaders sensés encadrés les activités économiques (mairie, services déconcentrés des ministères, programmes spécifiques du gouvernement, etc.)  Dans cet élan, Dynamique Mondiale des Jeunes (DMJ) a initié le « Projet de Renforcement de l’Encadrement Citoyen à l’Insertion Socioéconomique, la Prévention de la Violence et la Cohésion Sociale » (PRECISE-PREVICOS). Le projet est implémenté depuis 2016 dans l’Adamaoua (Meiganga, Tibati, Ngaoundéré) et depuis 2018 à l’Extrême-Nord (Mora et Mokolo). Ce projet vise entre autres de renforcer les capacités des communautés pour rechercher les réponses locales aux problèmes d’insertion socioéconomique des jeunes. Une spécificité est accordée au motortaximen dans l’Adamaoua, où il est question d’accompagner les acteurs du secteur moto à se formaliser, à mettre sur pied une politique d’épargne et de développement personnel, ou à se reconvertir dans un secteur mieux porteur et moins risqué.

[1] Taxe d’Occupation Abusive de la Voie publique (AOV)

 

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