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Au moment où nos forces de défense et de sécurité ont le plus besoin de soutien face à la guerre qui nous oppose aux terroristes, les populations de Mora et de Mokolo disent leur déception suite au traitement qu’elles subissent de ces hommes en armes qui cèdent de plus en plus à l’arnaque. « Lorsque nous transportons un client d’ici (ndlr : ville de Mora) pour Kourgui[1], il nous paye 1000F (…) Mais ce qui nous décourage c’est les militaires à l’entrée du BIM[2], qui récupèrent à chacun de nous 300F. Une fois à l’Entrée de Kourgui, les gendarmes de la compagnie et policiers de Kourgui, exigent 500F (…) Vous comprenez que c’est trop difficile puisque finalement on ne gagne rien (…) » Nous apprend Hila BOUKAR, transporteur moto et ce à la suite du septuagénaire LADA KOUMA, vendeur de bois habitant le village KASSADARA, qui plus tôt déclare que les gendarmes et policiers sur cet axe lui arrachent régulièrement 1000F et les militaires 500F, à chacun de ses passages vers le marché de Mora. Avant de conclure sous un timbre patibulaire que « je travaille pour eux (…) mes enfants ne vont pas à l’École (…) Leurs enfants payeront cher cette injustice (…) ». Que dire des dizaines de postes fictifs de Contrôle instaurés par ces militaires, le long des ruelles de l’espace « podoko », lesquels leur servent non de fouilles, mais d’extorsion d’argent ?

            Voilà une situation qui rime avec le sort des usagers de l’axe Mokolo-MOGODE. Nous y étions pour constater que six postes de contrôle desservent ce trajet rocailleux de 46 km. A la sortie de Mokolo, Gendarmes et Policiers sont visibles. Des gendarmes issus de la Brigade Territoriale de MOGODE, pointent aux postes de RHOUMZOU et KOSSOHOL. Non loin d’eux, c’est naturellement la GENDARMERIE ROUTIÈRE qui attend comme un guichet ouvert, le versement de chaque usager. Ce dernier en fin de parcours, devrait « motiver » les policiers de MOGODE, installés juste à l’entrée de la localité. Ceci n’est pas moins grave pour comprendre l’étonnement de Louis de Gonzague, enseignant, qui dit avoir assez de peines à comprendre comment vivent ces transporteurs motos. En effet, il nous apprend qu’il a versé Samedi dernier à un transporteur-moto, la somme de 2.500F pour se faire conduire de Mokolo à Mogodé. A sa grande surprise, « le clandoman[3] à l’arrivée n’avait en main que 800F (…) Gendarmes et Policiers ont tout pris (…) Et ce qui me révolte est qu’il est rentré sans passager (….) C’est assez difficile de comprendre (…)  »

            Si tout ce récit est insuffisant pour justifier le malaise que nous dénonçons, cela a néanmoins le mérite d’en révéler quelques indices. Et de là, l’on peut bien se  demander si ces nombreux postes de contrôle, répondent encore aux défis sécuritaires. Quel est même le sens de tous ces Check-Points au travers desquels, aucun contrôle effectif n’est fait ? Au moment où sévit le terrorisme, a-t-on besoin  de savoir si les pièces d’un véhicule sont complètes, alors que des passagers qui s’y trouvent ne font l’objet d’aucune fouille ? D’autre part, exiger la présentation des pièces d’Identité comme ça toujours été  le rituel, suffit-il comme acte essentiel dans un Poste de Contrôle supposé filtrer  des passages ?  Pourquoi ne pas s’en étonner puisqu’à MORA il y a cinq ans, nous denoncions dans les mêmes conditions, le sort des populations locales, exposées à toutes les misères de l’insécurité ? Faudrait-il se taire, lorsqu’on se rend compte que MOGODE qui aujourd’hui déploie autant de gendarmes à deux postes de Contrôle, ne parvient pas à contenir la vague d’insécurité qui y règne ?  Boutiques et  domiciles de grands commerçants y sont régulièrement dévalisés sans la moindre résistance des forces de défense et sécurité toujours interpellées. Quelques cas non exhaustifs survenus en 2016 servent d’illustration :

  • 18 Avril 2016: A RUMSIKI, chez M. KAKA qui perd cette nuit-là plusieurs millions de nos francs ;
  • 04 Juillet 2016: Deux braquages ont lieu. Le premier chez M. BALDA à MOGODE avec 4 millions de nos francs emportés et le second au lieu-dit VITE, chez M. VANDI qui perd 6 millions de nos francs après un précédent coup qui lui a fait perdre 15 millions ;
  • 27 au 28 Juillet 2016 : Le coffre-Fort de la Caisse d’épargne aurait été emporté ;
  • 11 Octobre 2016: 310 mille francs sont emportés du Coffre-fort du Lycée de RUMSIKI.

L’APPARENTE APATHIE DE L’AUTORITÉ DE L’ÉTAT…

Avons-nous besoin de plus de victimes pour que la situation soit prise au sérieux ? Faut-il tout de go conclure que les Comités de Vigilance sont en place et gèrent ces questions ? Dans tous les cas, refuser d’agir immédiatement dans le sens d’alléger les peines de ces débrouillards, de ces populations meurtries par la débine et le dénuement, serait la preuve de la mauvaise volonté des pouvoirs publics d’assumer leur responsabilité. Du reste, au-delà du cas de figure, l’arrondissement de MOGODE exclusivement est cet endroit du Cameroun où le fonctionnement des  Services publics va à vau l’eau :

  • En dehors des éléments de la Force Publique, du Délégué d’arrondissement du Commerce, d’Agriculture et du Sous-Préfet qui arrivent au boulot avant ou à 7h30 précises, nous avons constaté après de précises observations que tous les autres Serviteurs de l’État ne sont visibles à leur poste de travail qu’à partir de 10h, si ce n’est quelques fois par mois ;
  • Deux Enseignants dont l’un du Lycée de MOGODE et l’autre du Lycée de SIR, tous fils de la localité (nous taisons les noms) sont toujours absents depuis l’année dernière et n’ont apparemment pas fait  l’objet de sanctions et continuent de percevoir leur salaire ;
  • Le titulaire de la classe du C.E.2 de l’École Publique Groupe 2 de MOGODE est toujours absent. Au moment où ses élèves payent le prix, il reste imperturbable….

Et la liste est longue !!!!

Par,

Baby  JULAGO

[1] Banlieue, située à environ 7km de la Préfecture de Mora

[2] BIM : 42è Bataillon d’Infanterie Motorisée

[3] Transporteur de Taxi-moto